Je suis prof, enfin Maître d’ conf, mais j’ai fait des études pour ne pas devenir prof.
Pour commencer, j’aime Pennac, parce que moi aussi j’ai été malheureux à l’école. C’est fou le bien que cela fait de se trouver des frères de malheur. Je ne sais pas si cela guéri, mais cela fait du bien. J’ai eu mon Bac à une époque ou seulement 30% d’une classe d’âge l’avait. 10,5/20 avec des notes assez bonnes en sciences. OK, ce sera les sciences, oublions l’art, la musique, la littérature (je n’ai lu que très tard….). Deux premières années de fac pour me rendre compte que les études en sciences de la vie (et un peu de la terre) ne menaient, dans ma petite fac rémoise, que vers les métiers de l’enseignement. Instinctivement je sais que je dois alors changer de fac. 35 an plus tard, j’analyse pourquoi. Des profs qui mettent toute leur énergie à former des profs. On pense au lycée d’Aristote, à toutes les communautés de « sachant » de l’époque. C’est beau. Mais à la fin du 20°siècle, mettre une structure de taille industrielle (la faculté) à la reproduction des « sachants » comme 2500 ans auparavant, c’est bizarre. Enfin, moi je trouve cela bizarre. C’est comme dans un feuilleton des Shadocks. Une farce absurde. Des légions d’enseignants qui aspirent à se reproduire.
C’est sur, je ne deviendrai pas prof.
Par la suite, un concours de circonstance m’a amené à devenir enseignant-chercheur à Montpellier. Mon objectif était de ne surtout pas former des futurs profs, puisque la horde que je rejoignais était concentrée sur cette tâche. A cette époque le ministère de l’enseignement supérieur avait fait de l’insertion professionnelle son cheval de bataille, une politique et des symboles en rebaptisant sa direction générale avec un « IP » pour insertion professionnelle. Dans ce contexte politique favorable, je pensais que si j’agissais dans ce cadre et d’une manière différente que le business as usual de la fac, mes actions allaient être appréciées par la communauté universitaire. J’avais tort.